Steinbach - Silberthal : Sur le terrain
Le rocher du Hirnelestein
Sur les hauteurs du Silberthal, on accède au Hirnelestein (ou Hirnlestein), ce rocher de 35 m est un remarquable promontoire. On y accède en prenant un sentier qui monte droit dans la forêt, à droite du stand de jeu de quilles dans la clairière du Silberthal. Suivre, à gauche, le balisage plume d’oiseau qui conduit en 12 minutes au rocher (voir plan).
L'accès à son sommet se fait par un escalier aménagé et sécurisé. Il permet de découvrir un magnifique panorama sur le sud de la plaine d’Alsace, le Bassin potassique et la ville de Mulhouse, avec au fond vers le nord (à gauche) l'extrémité de la Forêt Noire, et vers le sud la grande bande des monts du Jura et par temps clair les Alpes bernoises.
L'observation du rocher révèle une structure constituée de blocs anguleux et durs liés les uns aux autres. Il s'agit d'une zone dans laquelle les roches ont d'abord été broyées puis des circulations hydrothermales ont provoqué le dépôt d’une gangue de quartz autour des fragments de roches, les soudant les uns aux autres. Ce sont les mouvements d'une faille qui explique cette zone broyée et la formation de cette roche appelée brèche de faille. Elle est très dure et résiste mieux à l’érosion que les roches encaissantes qui l'entourent et s'en trouve aujourd'hui dégagée. Ce rocher constitue une spectaculaire inversion de relief qui matérialise l'emplacement de la faille.
La faille vosgienne à Steinbach et aux alentours
La faille identifiée ici est la faille vosgienne. C'est une des failles majeures de la tectonique liée à la formation du fossé rhénan. Elle sépare le compartiment vosgien surélevé, à l'ouest, par rapport aux collines sous-vosgiennes, à l'est. Elle met en contact les terrains du socle primaire reliques de la chaine hercynienne qui affleurent dans les Vosges du Sud et les collines sous-vosgiennes, constituées de champs de fractures ou de conglomérats tertiaires, en bordure du Fossé rhénan.
Cette faille est rarement directement accessible sauf dans cette partie sud du massif vosgien, où la faille vosgienne est particulièrement visible dans le paysage car les brèches, qu'elle a formées, jalonnent son emplacement, sur plusieurs kilomètres de Vieux Thann à Wattwiller, notamment sous la forme de rochers promontoires comme le Drachenfels, le Hirnelestein, le Donnerloch, le Schletzenbourg et le Hirtzenstein pour ne citer que les plus connus.
Les terrains du socle vosgien en contact avec la faille, dans le cette partie des Vosges du Sud, correspondent principalement aux roches du stratovolcan du Molkenrain. Il s'agit des roches volcaniques produites par le volcan et des roches volcano-sédimentaires associées. Les émissions de ce volcan sont des roches acides (latites et rhyolites parfois émises sous forme d'ignimbrites). Cet épisode volcanique est daté du Viséen (autour de –340 MA). Ces roches appartiennent à la série magmatique Mg-K des Vosges du Sud, nommés SVMg-K et correspondent à l'émanation en surface du magma à l'origine du granite des Ballons qui s'est formé lors de l'orogénèse hercynienne (Voir la SVMg-K de la figure 3 de l'article sur les migmatiques). Ces roches peuvent être observées dans le fond du vallon en bordure de chemin ou dans les petites carrières qui y ont été creusées lorsqu'elles sont accessibles.
A partir du Permien, le massif hercynien a été largement érodé et pénéplanisé. Il est recouvert par la mer. Les dépôts continentaux du Trias se déposent d’abord, suivis de calcaires et de marnes au Jurassique. Au Crétacé, toute la région se soulève, les premiers mouvements alpins se font sentir. A l’Eocène (55 MA) débute la phase d’extension du rift rhénan dont la limite occidentale est marquée par la faille vosgienne. L’ère tertiaire est caractérisée par la subsidence du fossé rhénan, comblée au fur et à mesure par l’érosion des reliefs vosgiens, et en particulier par l’érosion complète de sa couverture secondaire qui s'accumulent dans le fossé mais aussi sous la forme de conglomérat de bordure que l'on retrouve en contrebas de la faille. Ce sont les collines que l'on peut observer en contrebas du Hirnelestein dans lesquelles on retrouve les produits de cette érosion.
Le fossé devient un piège naturel pour les eaux marines et continentales accumulées dans les zones les plus basses. Ainsi se déposent en alternance d’épaisses couches de sels et de marnes dans le bassin du sud du fossé rhénan. Par deux fois, autour de 30 MA, les conditions ont permis le dépôt d’une couche de potasse, la sylvinite. Le bassin potassique est bien visible depuis le Hirnelestein d’où il est possible d'apercevoir les terrils de son exploitation ainsi que les quelques chevalements encore présents.
Aux abords de la faille vosgienne, une intense circulation de fluides hydrothermaux a provoqué la formation de filons riches en sulfures de Pb et de Zn qui sont à l'origine de l'exploitation minière du Silberthal.
Les mines du Silberthal
La faille vosgienne est accompagnée d’un réseau de failles verticales secondaires, qui lui sont parallèles. Cette fissuration a permis une circulation hydrothermale importante puis la formation de filons par cristallisation des minéraux dissous dans ces eaux circulantes. On y trouve une association de minéraux, pauvre en argent, de blende, galène, pyrite et chalcopyrite. Ainsi les minéralisations filoniennes trouvées dans la région sont principalement liées à la faille vosgienne et donc à la formation du fossé rhénan bien que quelques filons métallifères soient eux contemporains de la période magmatique du Viséen.
Ces minéralisations ont fait l'objet d'une exploitation minière et ont donné son nom au vallon. Plusieurs mines ont été identifiés dans le vallon et font du site de Steinbach un site d'intérêt minier majeur en Alsace.
Parmi les mines de vallon, le site du Schletzenbourg a fait l’objet d’études archéologiques depuis 1991 et en particulier la mine du Donnerloch. Elles ont révélé que les travaux miniers du Donnerloch ont débuté autour de 1250 mais le principal site est la mine Saint Nicolas.
La mine Saint-Nicolas
Les filons ont été exploités à la mine Saint-Nicolas, dès le 16ème siècle, plus pour le plomb que pour le peu d’argent qu’on y trouvait. La mine Saint-Nicolas a été réhabilitée par un groupe d’anciens mineurs et de passionnés de minéralogie : le groupe « potasse ». On peut aujourd’hui la visiter en toute sécurité et comprendre comment se faisait l’exploitation des filons verticaux de minerai de plomb-argentifère au 16ème siècle puis au 19ème siècle. L’accès aux filons exploités se faisait par des galeries horizontales. C’est dans l’une d’elles que l’on peut pénétrer assez profondément pour découvrir les méthodes d'exploitation et leur évolution au cours du temps.
Documents annexes :
- Coupe géologique de la bordure ouest du fossé rhénan, à la hauteur de Steinbach (document MDPA, Jean-Marie Schlund)
Coupe géologique de la bordure ouest du rift rhénan
- Brèche de la faille vosgienne au Hirnelestein
Hirnelestein, brèche de faille, détail
- Carte géologique simplifiée de la zone du Molkenrain
Carte géologique simplifiée du massif du Molkenrain