Hohneck et vallée de la Wormsa : Sur le terrain
Les traces d’anciens glaciers dans la vallée de Munster datent de la dernière période froide, le Würm.
Ces glaciers ne se sont jamais développés sur de vastes étendues du côté Alsacien contrairement à ce que l’on enregistre sur le versant Ouest des Vosges. Leur avancée maximale n’a pas dépassé Metzeral.
D'après Andreoli et al.2006
Cette répartition des glaciers s’explique par une dissymétrie climatique. L’orientation du massif est perpendiculaire aux vents d’ouest. Ainsi, le versant Lorrain a accumulé davantage de précipitations neigeuses ce qui aura eu pour conséquence le développement de langues glaciaires conséquentes côté Lorrain. Une partie de la neige a été soufflé du côté Alsacien.
La répartition de ces glaciers s’explique également par une dissymétrie topographique. En effet, à l’ouest, côté Lorrain, les vallées sont peu encaissées, les pentes douces et l’altitude supérieure à 900 m, ce qui favorise le développement de langues glaciaires importantes. A l’est, côté Alsacien, les vallées sont profondes et délimitées par des pentes raides. Ainsi, les langues glaciaires étaient maigres et courtes car la fusion de la glace en aval, au niveau d’altitudes devenues rapidement plus faibles, a entraîné une disparition rapide du glacier.
Les glaciers Alsaciens ont donc toujours été de petits glaciers isolés les uns des autres par des barres rocheuses avec tout de même, quelques confluences des langues glaciaires.
C’est le cas de la vallée de la Wormsa, où, au dernier maximum glaciaire, confluaient les glaces du Schiessroth et du Fischboedle.
Les indices glaciaires sont observables à l’échelle du paysage, de l’affleurement et des roches.
A l’échelle des paysages, les cirques glaciaires du Schiessroth et du Fischboedle sont qualifiés de cirques en fauteuil. Ils sont logés au pied du sommet du Hohneck et séparés par l’arrête des Spitzkoepfe.
Figure 1 : Cloison des Spitzkoepfe séparant à gauche le cirque ceinturant le lac du Fischboedle et à droite le cirque ceinturant le lac du Schiessroth.
Leur morphologie est caractérisée par des parois raides en arc de cercle et un léger surcreusement occupé aujourd’hui par un lac.
Figure 2 : Lac du Fischboedle
Cette morphologie est liée d’une part à la lithologie et d’autre part à la forme préexistante du paysage.
En ce qui concerne la lithologie, le massif du Hohneck est formé essentiellement de granite présentant des diaclases espacées et souvent verticales (visibles en fond de cirque du Schiessroth) ce qui favorise la circulation des eaux de fonte en été, qui en hiver, gèlent et cimentent à la glace les parties de roches au niveau desquelles elles s’étaient insinuées. Le cirque se creuse ainsi par délogement des roches.
La dépression préexistante permet une importante accumulation de glace qui s’écoule lentement. Ce mouvement lent de la glace délogeant les roches est à l’origine du creusement du cirque glaciaire qui s’élargit progressivement. La cloison des Spitzkoepfe est la conséquence de l’élargissement des deux cirques.
Les vallées en auges sont assez rares du côté Alsacien ; celle de la Wormsa est ainsi exceptionnelle. Elle présente la forme caractéristique de ces vallées, c’est-à-dire des flancs raides et un fond plat. L’écoulement lent du glacier est à alors l’origine d’une érosion progressive et d’un élargissement de la vallée.
Figure 3: Vallée en auge : un verrou est visible sur le fond plat de la vallée.
Des verrous en gradins s’observent en aval des cirques du Schiessroth et du Fischboedle. Leur formation s’explique par la présence d’une rupture de pente préexistante et par la roche plus résistante et massive qui forme ces verrous. La glace s’accumulant davantage en amont du verrou exerce une pression plus importante qu’en aval. On observe un surcreusement à l’origine d’une dépression en amont du verrou.
D'après Lory
Les roches formant ces verrous sont des roches moutonnées ayant subi un polissage lors de l’écoulement rapide de la glace. Un bel exemple de roche moutonnée ceinture le lac du Fischboedle.
Figure 4 : Roche moutonnée du lac du Fischboedle: l'aspect moutonné se reconnaît à l'aspect général bombé de la roche. NB: on distingue également des diaclases qui ont été élargis suite à l'érosion post-galciaire.
En aval, la vallée est fermée par un arc morainique à environ 400m de son débouché dans la vallée de la Fecht.
Figure 5: Moraine frontale (au premier plan)
La moraine est cependant peu volumineuse car il n’y a pas eu de grande masse de matériaux arrachés en amont et poussés par le glacier. En effet, cette moraine est issue de la régression glaciaire. Elle a également perdu son modelé caractéristique car elle a été reprise par l’altération périglaciaire.
D'après Andreoli et al.2006
L’altération périglaciaire se caractérise par deux mécanismes principaux, la solifluxion et la gélivation. On distingue la microgélivation qui correspond à un délitage des roches poreuses et la macrogélivation qui correspond à l’élargissement des diaclases qui a pour conséquences un détachement de blocs de roches.
Au Tardiglaciaire, la gélivation s’est exercée surtout sur les flancs de la vallée en auge, sur les verrous et sur les parois des cirques. Ce processus est à l’origine des grands éboulis visibles au fond des cirques.
Aujourd’hui encore la gélivation altère les parois des cirques mais le phénomène n’est plus de grande ampleur et les éboulis visibles sont stabilisés et se recouvrent de mousses et de lichens.
Figure 6: Grand ébouli en contre bas de l'arrête des Spitzkoepfe
L’érosion actuelle s’effectue par l’alternance de gel dégel et le transport des particules est réalisé par des cours d’eau. Il est possible au sein de la rivière Wormsabachrunz, circulant à proximité du chemin d’accès proche du lac du Fischboedle, de repérer un granoclassement des particules de l’amont vers l’aval. Le suivi de la rivière en parcourant le sentier permet d’observer des particules de tailles plus importante vers l’amont, de repérer des replats où la vitesse du courant est plus faible et où les particules s’y trouvant sont de taille plus modeste. Plus en contre-bas, les particules auront des dimensions encore plus faibles.
Figure 7: Exemple de dépôt de particules à mi-chemin de la Wormsabachrunz