Schauenberg : sur le terrain
2 sites permettent des observations à des échelles de grandeurs différentes.
Premièrement le balcon qu’offre la position de l’Eglise du Schauenberg sur le fossé Rhénan permet à cet emplacement une lecture du paysage sur ses différents plans ainsi qu’une prise de connaissance du lieu lui-même.
Figure 1. Photographie du paysage visible vers l’Est à partir de l’Eglise.
Certains jours, on peut voir au nord, la cathédrale de Strasbourg et au Sud, les Alpes bernoises enneigées. Mais plein Est s’observe du plus proche au plus éloigné les collines sous-vosgiennes, la plaine d’Alsace, le complexe volcanique du Kaiserstuhl (Lien vers le site du Kayserstuhl) puis la Forêt Noire. Ainsi se dégage un profil topographique où la plaine d’une plus basse altitude (à chercher) au niveau de laquelle le Kaisersthuhl dépasse cette altitude moyenne, se trouve épaulée par les vosges et la Forêt Noire. Les collines sous-vosgiennes étant à une altitude intermédiaire entre vosges et plaine.
Figure 2. Dessin du paysage en direction de l’Est.
Une observation vers le Nord permet de marquer les variations de niveau entre les différents objets identifiés sur la bordure Ouest du fossé et autorise des interprétations.
Figure 3. Photographie du paysage visible vers le Nord à partir de l’Eglise.
On distingue ainsi une pente très forte qui sépare les Vosges des collines sous-vosgiennes. Cette pente forte se traduit par endroit par des falaises.
En contournant l’Eglise il est possible de se rendre sur son parvis et de se retrouver face à une falaise de grès (on peut la suivre plus au nord au-dessus de Gueberschwihr).
Figure 4. Photographie de la falaise de grès (note la falaise actuelle est maintenant équipée d’un filet pare-pierre).
Etant donné la position du balcon sur le profil topographique nous nous situons ici au niveau de la séparation d’avec les collines sous vosgiennes.
Les falaises s’interprètent alors comme un miroir de faille.
Figure 5. Dessin du paysage en direction du Nord.
La faille majeure de cette bordure Ouest du fossé est la faille Vosgienne. Les collines sous Vosgiennes sont le résultat du jeu d’un ensemble de failles et constitue un champ de fracture, celui-ci prend fin à l’Est par la limite de la faille Rhénane qui sépare les collines sous-vosgiennes de la plaine d’Alsace.
La carte géologique nous renseigne sur l'âge des terrains des différentes unités.
Figure 6. Extrait de la carte géologique de Colmar 1/50 000 60542.
Les Vosges à l’Est sont cristallines et surmontées d’une couverture sédimentaire triasique au niveau du Schauenberg. En dessous, à l’Est, de la faille vosgienne se trouve des terrains jurassiques qui composent le sous-sol des collines sous-vosgiennes, puis dans la plaine d’Alsace se trouve les terrains les plus jeunes. Par ailleurs la sédimentation au sein du fossé connue par forages permet de couvrir les âges allant du trias au quaternaire. La couverture sédimentaire d’Ouest en Est, recoupée par les failles, est alors disposée en altitude à l’inverse de la chronologie.
Les failles d’orientation Nord-Sud et de pendage Est ont alors accommodés par leur jeu normal l’extension à l’origine du fossé Rhénan. La plaine d’Alsace est la partie subsidente du fossé Rhénan.
Figure 7. Coupe Ouest-Est du fossé rhénan.
Le deuxième site du Schauenberg permet d’observer à l’affleurement le Trias Germanique du Bunsandstein. Pour cela prenez le sentier qui monte vers la table des druides, ancien lieu de culte celtique, lieu tellurique connu dans la région. Le long du sentier vous pouvez observer des failles dans le grès vosgien.
A l’ouverture du sentier, on se retrouve en face de blocs rocheux quadrangulaires qui forment une très belle sédimentation tabulaire appartenant au conglomérat principal. La table des Druides est un morceau de conglomérat principal (poudingue de Ste Odile) en équilibre sur deux autres blocs.
Figure 7. Photographie nue et interprétée de la sédimentation visible sur le bloc au Nord et à l’avant de la table des Druides.
EstOuest
On peut observer de belles stratifications entrecroisées et différentes zones granoclassées.
Sur cet affleurement, où l’on observe des particules de tailles différentes, se dégage une succession de lits sédimentaires obliques (en orange, quelques exemples, sur le document interprété) avec au sein d’un lit, des particules qui semblent de même calibre.
La surface d’érosion (plus marquée lorsque le grain est fin) visible à l’Est du bloc, ainsi que l’orientation différente de litages successifs dans la colonne forment des ensembles sédimentaires qui constituent des faisceaux de litages obliques.
Tous les faisceaux présentent une inclinaison similaires des lits (même orientation), avec cependant des angles d’inclinaison qui eux varient d’un faisceau à l’autre permettant ainsi de les délimiter. Une surface d’érosion est intégrée entre les faisceaux rendant également plus facilement visible ces changements d’inclinaison. (Les faisceaux sont délimités en noir sur le document interprété).
Cette succession s’interprète donc comme un empilement de matériaux détritiques au sein d’un chenal avec une phase d’érosion entre deux niveaux de sédimentation. La force du courant autorisant la sédimentation de particules plus ou moins grosses.
Figure 8. Schéma d'interprétation de la sédimentation fluviatile vue selon une coupe perpendiculaire à celle de l'affleurement précédent (Figure 7.).
Les figures sédimentaires observables aujourd'hui sur l'affleurement ont été obtenues après diagénèse d'une sédimenation fluiviatile au sein d'un chenal en tresse. La géométrie de ces figures sédimentaires permet également de renseigner sur le sens du courant du fleuve. Ces figures constituent alors des critères de polarités.
Figure 8. Détail de l’affleurement précédent (Fig. 7.) et critère de polarité (la main donne l'échelle).
On a déjà remarqué que les litages étaient plus ou moins inclinés au sein des faisceaux mais l’inclinaison change également pour un lit précis considéré. En effet, à la base de la lentille, du faisceau, le lit est positionné tangentiellement à la base tandis que lorsque l’on se déplace vers l’Ouest l’angle d’inclinaison augmente. Cette géométrie constitue un critère de polarité du courant qui s’écoulait alors de l’Ouest vers l’Est.
Les positions des galets attestent également du même sens du courant. Ceux-ci se retrouvent empilés par endroits et sont légèrement inclinés perpendiculairement à l’inclinaison de leur lit. (Les zones d'empilement sont montrées par un encadré rouge sur le document interprété (fig 8.). Les galets au sommet et à la base de l'empilement sont entouré en rouge).
Cette image rend compte d’un encastrement des galets les uns sur les autres : un galet se trouvant arrêté dans le lit du courant, le suivant roulant sur le substrat se bloque sur le précédent qu’il recouvre partiellement.
L’ensemble de cet affleurement rend alors compte d’une seule direction du courant, il s’agit d’une sédimentation non homogène concernant le débit mais homogène concernant l’origine des particules puisque celles-ci proviennent de l’Ouest.
Cette déduction reliée au contexte géodynamique du trias qui suit chronologiquement l’orogénèse hercynienne permet de conclure que cet affleurement résulte de la pénéplanation du relief hercynien.
Figure 9. Schéma de la sédimentation en milieu fluviatil.
Note : sous la table des Druides on peut voir une contre marque de ripple-marks.
Pour aller plus loin :
Formation du Rift rhénan : Livret scientifique du Parc naturel régional des ballons des Vosges : La géologie du massif vosgien et du fossé rhénan. (2007) -Thèse de Stéphane Roussé (ULP octobre 2006) Architecture et dynamique des séries marines et continentales de l’Oligocène moyen et supérieur du Sud du fossé rhénan.