Haut-Barr : Sur le terrain
4 arrêts d'intérêt
Schéma des différents arrêts possibles au château du Haut-Barr.
Arrêt 1 : Déterminer le type de roche.
La roche en présence est rouge, friable (formant un sable rouge) et raye le verre. Il s’agit du Grès Vosgien du Trias inférieur (Buntsandstein) constitué essentiellement de deux catégories de minéraux, du quartz et des feldspaths, associés à de rares micas.
On observe sur la hauteur de l’affleurement les différentes strates présentes ainsi que des surfaces d’érosion, permettant de discuter du principe de superposition.
Vues d'affleurement à l'arrêt 1.
Les litages obliques observables correspondent à des mégarides de courant ou à des barres fluviatiles vues en coupe. Ces structures sont formées par l’action d’un écoulement d’eau unidirectionnel. Les litages obliques indiquent des paléocourants dirigés vers l’est ou le nord-est (les litages pendent toujours vers l'aval). Les reliefs source de ces particules se situaient donc à l’ouest de notre région (emplacement du Massif armoricain actuel).
C'est l'altération de roches granitiques préexistantes de la vieille chaîne hercynienne puis leur transport qui sont à l'origine des grès, appelés dans ce cas roches détritiques, après diagenèse.
Litages obliques (en bleu) et surface d'érosion (en rouge).
Arrêt 2 : Reconstitution du paysage à la fin du Buntsandstein.
Sur toute la hauteur de l’affleurement, on retrouve les figures du 1er arrêt mais, ce qui marque rapidement, c’est la présence d’une alternance de strates de granulométrie variable : une strate à granulométrie fine puis une strate à granulométrie plus grossière, constituées de galets siliceux émoussés.
Superposition du grès Vosgien et du conglomérat à l'arrêt 2.
(les creux carrés visibles sont les encoches de la charpente d’un ancien bâtiment)
On voit nettement une superposition de 2 unités géologiques avec en bas le Grès Vosgien du Buntsandstein moyen (épaisseur de 300m localement) constitué principalement d’un grès grossier, de grains de quartz très arrondis et enduits d'un pigment ferrugineux (oxydes et hydroxydes de fer III). Des galets durs de quartzite grise (grès métamorphique) et de quartz filonien blanc sont disséminés. Ces galets proviennent de l'érosion des derniers reliefs de la chaîne hercynienne qui subsistaient à l'emplacement actuel du Massif armoricain. Ceci illustre les multiples aspects de la dynamique d'une plaine alluviale où des cours d'eau divagants érodent ou déposent des alluvions sableuses. Les dépôts grossiers s'effectuent dans les chenaux et la décantation des particules fines (argileuses) se déroule au sein des plaines d'inondation. Malgré les nombreux indices caractérisant un environnement fluviatile, on peut observer le façonnement éolien de certain galet (galets éoliens à facettes résultant d'un long travail d'abrasion par le vent chargé en grains de sable). On peut ainsi reconstituer un paléoenvironement de type plaine fluviatile traversant une zone désertique (comme le Nil actuel) et un paléoclimat sûrement de type aride durant cette période. La superposition de niveaux plutôt fluviatiles et de niveaux plutôt éoliens peut s'expliquer par la divagation du fleuve au sein de sa plaine alluviale aride au cours du temps.
Au-dessus du grès Vosgien on trouve le Conglomérat principal aussi appelé Poudingue de Sainte Odile (épaisseur moyenne de 15m) très grossier et très chargé en galets de quartz et de quartzite dont la taille moyenne est de 2 cm. L’observation de la lithologie permet de proposer un transport par l’eau de vitesses différentes (lien avec le diagramme de Hjulström). S'il y a un transport de galets, cela signifie qu'il y a plus de vitesse que lors du transport du sable. Cela peut s'expliquer soit par des pluies plus fortes (changement climatique vers un paléoclimat plus pluvieux, avec des pluies torrentielles) soit par une surrection des aires sources des matériaux détritiques, ayant pour effet d'augmenter la pente et donc la vitesse des cours d'eau.
Détails d'alternances de galets émoussés et de grains fins. Les litages obliques correspondent à une barre fluviatile ou à une mégaride vue en coupe.
Schématisation de 2 dépôts.
La forme émoussée des galets (malgré leur grande dureté) indique un transport prolongé et, d’après le principe d’inclusion, ces galets ont été formés avant le grès qui les contient.
Arrêt 3 : Des trous en forme de "boite d'allumettes".
La présence de trous (de forme rectangulaire ou ovale) traduit la présence d’anciens galets mous d’argilite provenant du remaniement de la boue par des épisodes de crues.
Lorsque la vitesse du courant est réduite (fin d'une crue ou fin du comblement d'un chenal fluviatile), de la boue peut se déposer (décantation des argiles).
Lors d'une crue, l'argile préalablement déposée est érodée et transportée sur une faible distance. Les galets d'argile ainsi formés sont emportés par le courant et se déposent mélangés à du sable. Après cimentation le sable se transforme en grès et l'argile en argilite.
Lorsque le rocher se retrouve à l'affleurement, le galet est érodé préférentiellement car l'argilite est plus érodable. Il se forme alors des "trous" correspondant à l'empreinte du galet mou d'argilite.
D’après le principe d’inclusion, ces galets mous sont antérieurs au sable dans lequel ils ont été inclus.
Moulage de nombreux galets mous.
Arrêt 4 : Sur le parking, observation des rochers.
Sur le rocher à l’extrémité gauche, on observe une succession de séquences. Chacune comporte des dépôts sédimentaires grossiers et épais (grès avec de nombreux litages obliques) et de fins niveaux d'argilite rouge (souvent couronnés par des fentes de dessiccation), indice d'une période d’émersion. Une séquence enregistre donc une baisse de l'hydrodynamisme.
La séquence suivante démarre par des niveaux grossiers (grès à grand litages obliques) remaniant souvent une partie des dépôts précédents comme les argilites, formant des galets mous. La limite entre deux séquences est ainsi très souvent une surface d'érosion formée lors de la migration d'un chenal sans sa plaine alluviale.
Cette alternance de dépôt grossiers et fin correspond à une séquence fluviatile, formée lors du comblement progressif d'un chenal.
Le haut du rocher correspond à la fin du Buntsandstein car on peut y relever la présence du Poudingue de Ste Odile qui indique, qu'au moment du dépôt, il y a eu un courant important.
Les 2 rochers, séquences et diaclase.
La passerelle entre les 2 rochers permet de mettre en évidence l’existence d’une diaclase à l’origine de cette séparation. Cette diaclase, selon le principe de recoupement est plus jeune (datant de l’Eocène-Oligocène) que la roche affectée (datant du Trias). La roche étant discontinue à l'emplacement de cette diaclase, cela a favorisé l'altération et l'érosion du rocher à cet endroit. La diaclase a donc guidé l'érosion et la discontinuité a été creusée jusqu'à isoler les deux pitons rocheux.
Des traces de fossiles
Aux arrêts 2 et 4, il est possible d’observer la présence de terriers (bioturbation) qui ont été creusés par des animaux difficiles à identifier (peut-être des vers) dans la vase de la plaine alluviale.
Fente de dessication et terrier.
On observe également des empreintes de végétaux dans le grès du château du Haut Barr (arrêt 4, mais il faut grimper sur le rocher). Ces empreintes se sont formées lorsque les végétaux ont été recouverts par du sable. Le sable a ensuite été cimenté et la matière organique a été décomposée, ne laissant qu'une empreinte du végétal initialement présent.
Des empreintes de végétaux en position de vie.